Vue sur les toits de Rouen depuis L'Odas Restaurant
Trois chefs qui reçoivent « comme à la maison »
Par Laurence Gounel
Pour encore plus de proximité avec les voyageurs certains restaurateurs ressentent l’envie de recevoir « comme à la maison ». Rencontre avec trois d’entres eux.
Chris Oberhammer, chef de Ristorante Tilia à Dobbiaco
Après un premier Tilia qui comptait une dizaine de personnes en cuisine, le chef a changé de cap : désormais seul au piano, il endosse à chaque service la responsabilité de régaler 16 couverts. Pas un de plus. « Cette fois, je me fais plaisir en proposant une cuisine de marché, généreuse. Une cuisine du dimanche, revisitée avec les meilleures techniques et les meilleurs produits. Contrairement aux tables qui proposent un plat avec une histoire derrière, ici c’est le plat qui raconte ce qu’il veut. »
Les hôtes de Chris Oberhammer ressemblent à son restaurant, exigeants mais simples. « Ils viennent ici pour manger et cela tombe bien car c’est ce que j’ai retenu de mon passage au Louis XV par exemple. Le chef Franck Cerutti nous rappelait toujours de ne jamais oublier que les clients étaient d’abord là pour manger. Et ici, cela prend toute sa dimension : j’aime l’idée de proposer une “cuisine vraie”. »

Chris Oberhammer, chef-propriétaire du Ristorante Tilia
Olivier Da Silva, chef de l’Odas à Rouen
Un menu unique intitulé « Prendre son temps »
Le décor et l’intention sont posés. Le déclic ? Sa rencontre avec le chef Benoît Bernard, franc-tireur de la gastronomie, qui le décomplexe en partant du principe que l’on peut se faire plaisir sans se prendre au sérieux. Résultat, Olivier Da Silva suit son instinct quand il vient s’installer en 2013 au cœur de Rouen. Avec un menu unique « emmenant mes hôtes là où ils ne seraient pas allés si j’avais mis ces plats à la carte », qui provoque l’échange.
« Je ne m’interdis rien, je les reçois comme à la maison. Dans un dîner privé, on ne choisit pas son menu. Et c’est ce qui me plaît : les piquer à vif, créer la surprise. » Les éloges venant, la pression est là mais sans excès. « J’aime l’idée que mes hôtes viennent comme ils sont (en short, tongs ou en costume…) et qu’avec cette cuisine d’instinct, certains n’ont jamais mangé deux fois la même chose en cinq ans. »

Olivier Da Silva, chef-propriétaire de l'Odas © Thomas Boivin
Olivier Bruez, chef de La Tour Penchée à Sevenans
En reprenant cette institution du Territoire de Belfort dans un village de 350 habitants, le chef a créé du lien avec les producteurs locaux autant qu’avec les Sevenanais. Depuis son arrivée il y a un an et demi dans ce restaurant de 20 couverts, il a le souci de développer son « écriture » avec le terroir alentour, de préférence avec les producteurs qui commencent, comme lui, pour développer une belle solidarité… Les habitants du village ? Certains lui ont d’emblée apporté les fruits de leurs vergers : pêches, pommes, prunes, coings… « C’est simple, l’été dernier, tous mes desserts et sorbets ont été cuisinés avec les fruits des voisins ! »
Son ambition : créer une expérience unique, en isolant bientôt une table de son restaurant, la Table du Chef, à laquelle il réservera un menu spécial à chaque repas, servi en personne à ses hôtes. « J’habite sur place donc je pars du principe que je reçois un peu comme chez moi. J’allume la cheminée midi et soir. Recevoir comme à la maison n’est pas qu’une image ici. Du sourcing local jusqu’au service, j’essaie d’avoir une démarche globale et cohérente. »

Olivier Bruez, chef-propriétaire de La Tour Penchée